GUERRE EN UKRAINE : TRUMP N’EST PAS éTRANGER AU VOTE PAR LE CONGRèS AMéRICAIN DU PLAN D’AIDE à KIEV

ÉTATS-UNIS - En changeant son fusil d’épaule, Trump a montré son pouvoir d’influence sur la politique étrangère américaine. Pendant six mois, les républicains ont fait barrage à un énorme plan d’aide à l’Ukraine, mais la Chambre des représentants a finalement adopté samedi dernier une enveloppe de 61 milliards de dollars destinée à soutenir les troupes ukrainiennes au front. Et le texte a passé sans encombre ce mardi 23 avril le révélateur du Sénat, mettant fin à des semaines de blocage. Or si, comme par magie, toute obstruction a été écartée, l’influence de Donald Trump auprès des élus républicains n’y est pas pour rien.

À première vue, l’adoption d’une aide à l’Ukraine semble être un énorme revers pour l’ex-locataire de la Maison Blanche. Ce programme d’assistance économique et militaire était en effet porté depuis des mois par son rival démocrate et actuel président Joe Biden. Donald Trump s’y opposait farouchement, se montrant critique à l’égard de l’Ukraine, « tout manifestant publiquement sa sympathie à l’égard du président russe Vladimir Poutine à plusieurs reprises », rappelle le Washington Post. Il avait d’ailleurs convaincu en février les républicains de ne pas adopter ce même plan d’aide.

La peur d’une défaite de l’Ukraine avant la présidentielle

Mais Trump a su changer d’avis au bon moment pour sauver son image, en proposant une aide sous forme de prêts à l’Ukraine. Ce revirement total est en partie lié à une discussion qui a eu lieu à Mar-a-Lago, la propriété de Trump en Floride, avec le speaker de la Chambre des représentants, le républicain Mike Johnson. Ce dernier était, lui aussi, d’abord opposé à tout interventionnisme en Ukraine, avant de donner son feu vert pour un plan d’aide pour l’Ukraine, Israël et Taïwan.

« Avant le vote à la chambre des représentants, les deux hommes se sont rencontrés. Le speaker lui aurait donné un certain nombre d’informations privilégiées, venues des services secrets, sur la situation difficile de l’Ukraine au front », explique au HuffPost Serge Jaumain, professeur d’histoire contemporaine à l’Université libre de Bruxelles et spécialiste des États-Unis. Or, poursuit le chercheur, « Trump a conscience que si Kiev est défaite avant l’élection présidentielle, on va lui en tenir rigueur ».

Outre la crainte d’une détérioration rapide de la situation militaire, Donald Trump pense aussi à attirer de nouveaux électeurs pour la présidentielle de novembre. Il sait que pour séduire les indécis, le soutien des États-Unis à l’Ukraine compte. « Les Américains n’en peuvent plus des conflits à rallonge dont ils ne voient pas l’issue », estime à cet égard Nicolas Conquer, porte-parole des Républicains Overseas, qui représente le parti de Donald Trump en France, auprès de franceinfo.

« Il continue d’être le leader du parti républicain »

Olivier Burtin, historien des États-Unis contemporains, pointe auprès du HuffPost un autre facteur ayant participé au revirement de Trump et Johnson. Selon lui, l’ex-président républicain craint de voir se déchirer le Parti républicain, qui s’est déjà délité sur ce projet de loi. « Trump, actuellement empêtré dans son procès à New York qui l’empêche de faire campagne durant la semaine, ne veut pas d’un nouvel épisode de combats fratricides au sein du Parti républicain, comme l’an dernier lors de la destitution du prédécesseur de Johnson », explique le maître de conférences à l’Université de Picardie, rappelant que ce départ provoqué par un élu trumpiste « avait été décrit de façon très négative dans la presse ».

« Je pense donc que ce vote n’est pas un revers pour Trump mais plutôt la confirmation qu’il continue d’être le leader du parti républicain », juge encore Olivier Burtin, qui appelle toutefois à surveiller dans les prochaines semaines un éventuel début de fronde entre Trump et ses propres soutiens au sein du mouvement Make America Great Again.

« On voit qu’un candidat à la présidence a une influence considérable sur la politique étrangère des États-Unis. C’est du jamais vu », complète Serge Jaumain. Pour lui, une partie des républicains continuent de lui « obéir au doigt et à l’œil ». Sans parler d’une « victoire » de Trump, le dossier ukrainien « montre sa puissance politique intacte avant la présidentielle ».

Pour autant, si Trump a mis son nez dans le vote de l’aide à Kiev, cela ne veut pas dire qu’il se souciera du sort des Ukrainiens une fois réélu face à Joe Biden. À plusieurs reprises, le républicain a rappelé qu’il irait voir son ami Vladimir Poutine pour trouver un accord sur la guerre en Ukraine, et a affirmé en avoir assez que les États-Unis aident les pays en guerre qui ne remboursent jamais. « America first » reste donc bien évidemment son mantra.

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